J'ai mis des têtes dans un corps d'osier
Je suis outrageant, je n'aime pas les endroits ténus, les couloirs attenant des salles étroites et suffocantes comme des étuves, les mille portes qui claquent sur encore des minceurs, des bavardages silencieux. Je suis rationnel et je m'oppose à ce monde étroit comme un labyrinthe, à ces murs soutenant des plafonds carcéraux, de plans impossibles où le ciel ne se mêle que de déchirements, d'orages et de pleurs.
Je veux des cris, des rages, je veux des forces qui me jaillissent comme la main de Lazare hors de la terre qui le gardait. L'on m'a dit « l'habitude est venue, elle portait une robe granit, et des yeux gémeaux, elle est venue pour toi, elle a dit, tu es un fugitif, tu la fuis, elle a dit tu refuses avec tes yeux insolents, avec ton étonnant visage qu'on croit fait pour le malheur et qui pourtant abaisse toujours sa bouche sur des yeux bleus, bouleversés de ciel. ». Cent fois je me disais « renonce » et je ne renonçais pas, quelque chose dans moi se raidissait comme une loi, quelque chose dans moi refusait, insoumis comme une origine, comme une nature, un caractère antique tout abrité de mes gènes. J'ai voulu me confondre, dire « je serai beau, je serai idiot, soumis, je baiserai une terre fétide, j'embrasserai des usages, je dirai, il faut travailler, s'incliner, baisser la tête dans les conventions, se mettre le coeur dans le tombeau du couple ». Mais je n'ai pas pu, quelque chose dans moi volait haut comme un oiseau dangereux, quelque chose comme des serres déchirantes qui poussaient vers les astres, où les comètes crachent leurs crêtes en flammes, où l'étole brûle.
Il y a partout, des fleurs maussades aux couleurs étonnées, qui disparaissent, qui se laissent absorber par les tintements des rivières, dans l'intermittence du courant on y sent des odeurs lointaines, qui parviennent en vagues sussurées, qui se secouent, et grelottent aux vibrations des saisons d'hiver; S'entendent leurs reflets s'ébattre dans la lisière des rires, s'entend le coeur irrégulier d'une fleur merveilleuse, où les filaments gris des matins, où les châtiments violets d'un crépuscule abîmé viennent sucer leurs miels bourdonnants. Il y a partout au bord des villes, ces fragilités aux parfums mécaniques, qui ahanent plus qu'elles n'exhalent les invisibles saveurs de tes paupières de vierge. Roulent à leurs os des vins frelatés, des ivresses maigres comme du désespoir. Les senteurs amusées, volent comme les jupes froissées des feux-follets. Toute la nature s'éveille, les loups borgnes, dangereux menacent la sueur aux poils Ce sont, ce sont, les foules amassées. Et les fleurs continuent immobiles, courbées de rosée, qui plieront plus encore sous le zénith midi. Il est, des cris qui habitent dedans les pétales, et les tiges fendues, vulgaires, des fleurs malades toussent des pollens, comme le poumon taché de gaz nocifs. Il y a partout des fleurs maussades qui fument des odeurs invisibles, des cigarettes couleur morne du bonheur, et leurs mines de pavillons ordonnés, les cernes violettes des lavandes, les oeillets du matin qui le tachent, qui le dispersent; Il y a des jours, qu'on ne devine que dessous le ciel des factices faïences. Ces fleurs se nourrissent de l'oubli des fleuves enterrés, Léthé y mâche leurs racines de ses deux boucles de fillette mauvaise.
Des fleurs encore, pleines du bruit de la nuit, encombrées des amours qui s'y glissent, qu'on y souhaite et qui y dérape. Des fleurs sur lesquelles on joue des musiques mortes, et qui grince comme des violons brisés, dont les cordes gémissent en plaintes d'orphelin. Il y a ces fleurs, ces fleurs bouleversées de matin, qu'on croirait même qu'elles y brûlent, et dans la ville, dans les couloirs étroits où les gens se frôlent, sans se toucher, s'effleurent sans se fêler, les brûlures du néon vous font passer la tête sous de blancs incendies, sous ces jours de synthèse et les pendus balancent leurs corps de pailles au bout des cordes du nylon. Il y a des condamnations à mort qu'on rédige sur du papier à musique, des petites bulles policières saisissent les cous de poussière. Sous ces colères raides, et les torsions des fatigues. J'ai su ma bouche faire avancer des mots de menace, des pouces tendus, injurieux, des félicités dans la langue bachée, j'ai tout entretenu au dedans, j'ai fait vivre le monde des rebellions à l'heure où les tyrannies étendent partout leurs dehors de regards affamés. J'ai refusé toute la scélératesse du monde, l'on me regardera mourir, je ne me défendrai pas tandis que les armes victorieuses baiseront mon front comme le baiser de l'amante celui de l'amoureux éploré, j'aurais au cou la même marque fatale que le baiser vainqueur de la courtisane sur les draps vicieux du prince naïf. Je serai superbe de mon chagrin, beau de ma mort de juste, et mes yeux, éteints même, sombres encore, jetteront plus loin leurs lumières blessées que tes yeux bleus et vivants
Que l'on me loue le tombeau pâle des yeux ligneux. Que l'on me prête ce corps lugubre où ensevelir toujours l'âme, les lumières des phares qui capturent les pluies dans leurs orbes , les regards poudreux où les rivières sèchent comme des eaux salées, brisées d'écume. J'ai vu un visage où les bords de rives semblaient des reins allemands, des tourbillons en lieu de paroles, furieux, j'ai vu un visage où les eaux meurent, où le sable des berges mélange les regards au bleu incertain des horizons. J'ai vu des yeux chercher la lumière pour qu'elle leur crève les yeux de ne savoir endurer l'éclat vrai du désespoir.
Qu’on me loue enfin ce gisant, blanchi à la chaux avec les lignes du ciment en relief comme des lignes de main—très loin sous terre.
Volutes.
Tu portes un dos-nu.Je ferme les volets.Quand je t'entends tousser, c'est l'odeur du raisin qui étouffe au fond d'un oeil.Je t'en prie, ne tousse pas.J'ai l'impression de te perdre.Je préfère quitter la pièce.Pour ne plus entendre.Le silence lâche.Mais le silence.Tu connais l'amour.Tes yeux ont déja transpiré bleu.Apprends-moi.Tu porte un dos-nu et des jambes blanches.L'air ne passe plus dans le salon.La pluie.Dehors.On ne fait que l'entendre, on ne la voit pas.C'est une menace l'amour.Dis moi que non.Ne sois pas malade.Apprends-moi encore.J'entends le rythme de ta gorge qui suffoque.Comme une musique violente et arrachée.Comme un noeud.C'est une panique l'amour.Je suis mon propre étouffement et je me tisse.Battant.Battant fin.Comme les gouttes.Gouttes d'enfant.Gouttes de Feu.Gouttes de lumière.De coton imbibé de toi.Goutte d'Adieu.De sueur.De limites.Comme la dèche.De la lune.Qui s'émiette.Sur ton visage Tu es Dieu.Tu es Dieu.Va t-en.Va t-en.Repousse-les.Tu sais, pour plonger, il faut mourir.Respire sous l'eau.Tu vas t'étouffer.Tu es.Comme le siècle nu.Je ferme les volets.Dans le noir, tu t'endormiras, et j'irai poser mon oreille contre ton épaule, pour écouter les baisers, que ton amant a du déposer.Pour apprendre l'amour.En fermant les yeux.Pour ne pas voir sortir de ta gorge, l'ennui des années qui passent, quand tu tousses J'ai l'impression que l'amour est une chute. Dieu, la lettre majuscule, c'est le cryptage à décodage facile.
Aveugle
J'ai un oeil qui tombe sur le béton, il glisse le long du trottoir de la place Wilson. Celle qui ressemble à un gros ventre rond. Avec son cinéma et son pays pour personne. Comme une bille fruitée, l'oeil roule le long du corps, comme un diable transparent, on pose les doigts sur les lèvres. Cette serrure que l'alcool entrouvre. L'oeil va à la rencontre. Je suis hors du monde. Nous sommes hors-norme. Le pèlerin au baton manquant, pour rosser, pour cogner. Je ne connais plus mon sens. Le sang est tendu, et j'entends la vitesse du ciel qui déconcentre les artistes de l'amour. J'entends les mots enfumés. Je te vois. Non, je ne te vois plus. Je t'ai vue. Et c'est terrible de dire ça. Je t'ai vue. Oui, je t'ai vue je te cherche. Tu es peut-être là pourtant, je ne sais pas, je te vois. Tes courbes sont floues, mon ombre est morte. Je voyais, ton visage comme un jour qui se lève, je te voyais. Fureur. Je t'ai vue, et tu n'es pas passée, tu es entrée. Entrée. C'est comme se lacérer le corps au dessus de l'émail et ne pas saigner assez. C'est la gorge de diamant dans le langage du rire. Je me frappe mais ça ne fait pas mal. Je me cloue des nuées lumineuses sur la lèvre. Si je ne te vois plus, c'est que je ferme les yeux ? C'est que tu es sortie ? Tu vois, je te vois encore, là. Tu pourrais voir pour moi. Tu pourrais. Moi, je perds la vue, doucement peut être mais je la perds. Tu entends mon oeil qui tombe sur les pavés roses ? En miettes. Je ne vois plus que toi. J'ignore l'empreinte du monde sur mes paupières. Je te vois qui presse la pulpe de mon iris Je te vois, et c'est étrange parce que je ne sais pas où poser les mains sur toi. Ca dérape. Tu es la scie à mille dents. Je suis dans le noir électrique. Alors parfois tu recules, mais je te vois, tu comprends. Je ne sais pas où je pose les mains. Et si je te mords ? Tu me le pardonneras ? Des coups de poings de fièvre amoureuse. Je vois dans le noir. Ta voix fait écho dans mon geste. J'ai un soleil qui s'enfante dans le ventre depuis cinq heures et huit minutes du matin le 5 janvier deux mille onze. Je suis perdu, comme l'enfant, comme l'étoile, comme un portrait. Et c'est difficile tu sais, de reconnaitre tes saisons dans mes brasiers. J'essaie, pourtant, et je rêve la langue que je broie ? Et ça m'effraie, cette assurance, c'est comme A qui lance des cailloux et qui n'entend pas le bruit. Le bruit de la chute. Elle n'entend pas, pourtant elle lançe fort. Elle s'effraie. Ses muscles comme une petite robe dans la neige sous le lit. C'est comme le soir, là, qui voit les cailloux s'épuiser vers le fond de la mer morte sans bruits. Je te vois, et le parfum dans le cœur poreux. Et quand je me console , je ne sais plus quel nuage fondu je console. Et quand je dis « c'est beau l'amour », cette putain de poésie, j'ai raison . Je suis dans le corps du temps. Je t'ai vue, je te vois. Je frappe et ça m'aveugle. Parfois, tu dis qu'il ne faut pas, pas ici. Et là ? Et là, je peux ? Je ne vois plus. J'ai de la vitesse dans mon sang, cette nuit là, un loup en ruines dans l'assiette, une cave interdite. Je suis sans jambes, qui titube devant la Reine sablée, devant nos yeux gonflés de violence, qu'un éclair de lune n'a pas pu calmer. J'ai jeté mes cheveux par la fenêtre, garçon de rien, garçon de toi. Et j'ai le sang blanc comme une hirondelle chassée en plein vol. Mon oeil escalade la rue, dans laquelle, en pleine nuit, dans le noir, nous nous sommes violés de minuit, nous avons bu minuit, et ivre de minuit, mes gestes étaient sans images, je te sens mon amour violent.
Je t'.
J'ai rêvé cette nuit l'auge où je baigne ma peau est celle où le reste du monde boit. L'eau impure de mon corps, les miettes en suspension de mes blessures désaltèrent les bouches fatiguées des voisins. Je suis la source.
Souvent je pense à toi. C'est une pensée innocente comme un témoin. Elle est présente sur le lieu des crimes qu'est mon corps. Mais elle ne fait rien cette pensée que penser à toi. Elle te regarde et t'adore. Je pense à toi, je te sens te transporter dans moi, je te sens à l'intérieur de mes veines. Tu es projetée avec cette pensée, projetée à l'intérieur de ce frêle esquif comme toute muse pour la viste des pays de poivres et d'épices. Tu es dans moi, vraiment, mon canot de secours quand ma bouche suffoque sous les eaux vives des torrents.
Je ne sais pas le goût de tes lèvres, combien de sucres s'y figent, pourquoi tes lèvres ont la couleur étrange de mes souvenirs granulés, ce sable cristallisé sur ta bouche. Toutes les fractions de toi, toutes ces parties, je voudrais y mordre comme dans un fruit, je voudrais y grimper. Tu as les yeux bleus qui détonnent, longtemps je les ai attendus, longtemps je les ai enregistrés dans ma mémoire qui s'ouvre comme un tiroir pour les faire revenir dans les pièces bleues de nuit. Ce que je te décris, avec mes pensées, c'est un mouvement, c'est un corps, mon corps, qui se tend vers ton idée. C'est une pensée sans membres, une pensée sans voix, qui ne te griffe pas. Quand tu marches, proche de moi, que ta voix change le vent, que tu en modules les paroles. J'aime, ce que tu prononces, je t'avoue, je n'écoute pas, mais tu inventes des couleurs dans mon paysage. J'ai une sorte de maladie des nerfs et des sens qui transmute en des saveurs les mots, les voix, les lettres, je les vois impliquées dans des chromosomes, dans des figures géométriques, j'en cherche le théorème, la formule, je te trempe dans des solutions pour te séparer et te mettre l'amour à boire. Quand tu me parles, quand les lacs bleus de tes yeux, quand leurs rondes extases parcourent et projettent comme des miroirs plein de lumière ce pâle des aubes, je souris. Je ne le dis pas, bien sûr, c'est trop plein de civilités une discussion, privée des sens, c'est poli, éduqué, c'est plein du rire surfait, faux, du rire qu'on trouve dans les petites potions alcoolisées. Je n'ai pas le droit d'être tout à fait étendu, pas le droit d'incliner ma tête dans le geste de l'ému, mais en pensées je me penche pour voir dans toi cette image très belles, très bouleversantes. Tu m'émeus, je t'attends souvent, sans une parole, je conserve des intuitions de toi. Tu me bouleverses.
Je t'aime.
Mon visage taillé dans le crime
Je suis la dernière geste d'un corps mixte, l'orient d'une pureté, le nadir d'un fantôme. Je refuse l'effort, quand il pointe sa petite cornaline grise. Je suis le résidu de l'alliage mis au creuset, l'endroit des réunions secrètes où se montent les poisons. Je suis le corps du complot. Je refuse l'effort, l'abstention du courage. Je refuse de travailler. Je n'ai jamais rien obéi. J'ai fait semblant, j'ai le visage sage. Le visage de celui qui ne ment pas. D. me disait "tu as le visage bavard, il dit tout ton sentiment" j'ai le visage menteur. j'ai le visage insensible, j'ai le visage de l'escroc qui s'excuse, qui se confond et la main de l'aigrefin qui dans les octaves de la bouche descend d'autant dans la bouche à receler.
Charlotte me disait "Tu ressembles à André Breton", et elle disait "ce n'est pas tous les jours un poète avec une vraie tête de poète". Elle gémissait poliment "ah, oh, hi", on faisait l'amour, j'avais mal à la tête. Mais elle mettait ses doigts dans ma braguette, elle disait "tu as quel âge, déjà, personne ne sait jamais". J'ai deux prénoms, qui vieillissent chacun leur tour. Je n'aime pas le corps qui oublie, je viens déranger, je viens faire des usages, pardon, jeune fille, je vous bouscule, "ah oh hi" c'est comme ça qu'on dit, je crois, quand on traverse une chair qui vous résiste. Pourquoi je ne passe pas à travers. Je regarde le spectacle, je suis dehors l'orgie. Charlotte me dit "c'était bien ?" Je dis, j'aimais bien les images, mais ça manquait d'effets spéciaux pour un film. Je disais, je ne sais pas, je n'étais pas là, je disais pourquoi tu me demandes, je n'ai pas de corps, j'ai des yeux, je vous voyais faire, tu traitais avec un autre. Je ne suis pas là, tu comprends, moi je regard faire, je suis absent. Je n'aime pas les corps, ça me donne la nausée, ça me travaille des organes de pensées. Je dis. Moi je ne veux que l'amour, que l'érotique bafouement, je veux le marbre des déclins, je veux tes seins de muses sacrilèges, je veux les desseins de ton corps, le relief imprimé sur les pages. Mais je ne veux pas le péril de mes fragilités je ne veux pas le risque de mon corps, le mettre sur le rebord d'un autre corps plein des vertiges des falaises, je ne veux pas, le reste, alors je confie à un autre la chaîne, la soif, je confie à un autre, je lui prête la voix qui fait "ah oh hi", mais je me suis exclu, j'ai excipé mon incapacité. je suis déjà en vacances, je sens la mer qui tonitrue. je n'ai pas de désir, je ne suis pas sexué, j'ai plein d'hormones qui se combattent et s'annulent plein d'hormones qui se mélangent dans l'atmosphère et qui gravitent comme des planètes autour des mots. Je capture, j'ai mon éprouvette d'effluves. Charlotte me dit "mais c'était comment", pourquoi des points d'interrogation, pourquoi ta bouche a la forme d'une ponctuation, recouvre ton éducation, ne fait pas comme les autres. trouve toi une voix, trouve toi une révolte. ait faim, ait soif, casse tes os, voûte tes envies, mets toi toujours en travers des gens, brise tes dents en mordant dans la pierre. sois insoumise. Je peux t'apprendre, j'ai mon corps en opposition, je suis né perpendiculaire.
Des hommes ont dit « le raffinement c'est trop lourd, trop long, trop plein de malheur » et ces hommes se sont associés pour former la première des sociétés modernes, ils ont dit, « le mot de raffinement, c'était presque ça, on était pas loin » et ils ont appelé leurs esclavages, leurs soumissions, ils ont dit leurs nuques courbées : « raffinerie » « il faut devenir, une raffinerie, traiter d'un liquide noir comme l'encre et en faire une chose transparente comme l'essence ». Les hommes, depuis, peinent le jour -et pensent y vivre, filtrent la nuit à travers un tamis qu'ils disent « le sommeil » tant elle était pleine des mystères auxquels ils avaient renoncé de découvrir, pleine des vérités en lesquelles il refusait désormais de croire, pleine des magies que leurs raisonnables sommeils avait appelé « songes, cauchemars et délires. Toutes ces raffineries ont des respirations de fumées, polluent ce pays du très tard, qui prend sa pleine expansion au nadir de la lumière et interdisent à l'éclat des poèmes de répandre toute sa démesure.
comment fait on pour devenir une usine, une chaîne de montage. prête moi tes gestes de labeur. ça se penche comme ça une tête intelligente,oui, comme pour recevoir un sacrement, comme pour accueillir la vieillesse qui fait son dépôt sédimenteux, calleux. je ne vieillis pas. quinze ans, ont mes cris. je suis un adolescent. on me le dit. Guillaume m'écrit "tu ne pourras pas vivre toujours comme ça, on en meurt". je ne veux pas de tranquillité, je veux de la vitesse, je veux être perturbé, je veux être dérangé, je veux dedans sentir les choses qui s'agitent, les couleurs grelottantes, le froid dans la lumière, la neige si liquide qu'elle couvre, qu'elle remonte, qu'elle dissout les os. comment devient on un artisan de la geste, comment perd on l'outrage je ne veux pas savoir. Comment vous imiter, comment ne jamais avoir de position, être vide en tout pour accueillir tout le bruit, toute la suggestion du dehors. Je suis plein, ma bouche crache des images, voyez les forêts de pins secs, voyez les fourneaux embrasés, voyez mon âme de fumée, et mon ombre qui m'abandonne loin derrière. Je suis plein de lumières, de trous, plein de limites et de fils, plein de moteurs et de chansons, on dirait que mon corps a pris feu dans la révolution des astres qui s'entrecoupent, on dirait qu'il s'y joue un drame qu'une bouche de spectacle mange, et qui repousse comme un foie maudit par les dieux. Le drame est un organe. BONJOUR DIT MON FOIE JE SUIS PROMETHEE. Je fais des recueils d'insultes, je compile des plis de rage, et d'écumes on me dit "bravo" c'est un bravo bourgeois comme un vingt sur vingt en rédaction. Je déchire toujours, les notes que j'obtiens. Je n'ai pas supporté. Louis Le Grand, les honneurs ça me fait tousser comme une allergie à la craie, je suis fait pour l'anonymat, je suis fait pour les habits du crime, je n'aime pas la lumière, on y voit les gens laids, je n'ai pas supporté, "bravo" ça veut dire quoi "bravo" ça veut dire que la nuit tient dans deux syllabes, bravo, ça veut dire que la douleur, le mal et l'absence peuvent se ranger dans les étagères des mots, ça veut dire "bravo de souffrir, bravo, encore un peu, je veux dire bravo si c'est comme ça qu'on écrit quand on se convulse quand les poumons normaux suffoquent de fatigue" comment c'est possible de remplir d'autant d'essence deux citernes en papier. Je n'ai jamais fait d'efforts. Quand il faut faire des devoirs, rendre des copies, travailler un exposé je commence à quatre heures, et je finis à six, je dis, les mots je les ai pris dans mes cernes, je dis, les idées je les entendues paître dans un champ d'huile d'opale, jai jeté des chiens affamés dans un miracle, oui, mes idées ce sont des miracles fragiles et fêlés. Personne n'a les mêmes. Personne ne peut imiter les couleurs dans ma tête, les couleurs qui s'assemblent, les couleurs reproduites, les couleurs amoureuses. Je lis très vite. J'ai tout lu. La philosophie, une nuit qui ne partait pas, une nuit incrustée dans moi comme une tache. Elles sont rares comme de l'uranium, dangereuses pareilles. Ca brûle dans des machines infernales, qui font des bruits de cauchemar. Je sais, une fois, je me suis coupé les doigts sur des idées et tant de drames qui ont saignés, tant de liquide depuis la naissance qui sont venus et toutes ces voix qui ne me quittent pas sont jaillies. Je sais tout faire, je peux tout écrire, tout dire, mais je ne ferai pas d'efforts, je ne me forcerai pas. Je ferai semblant, je dirai "plus tard, oui". Je dirai quand on m'accusera de ne rien faire, de rester en dehors de l'effort, de me tenir à l'extérieur :
- Tu es si belle quand tu travailles, laisse moi te regarder
- Mais je ne suis même pas là
- Alors laisse moi t'imaginer, oui, je t'imagine travailler, laisse la poésie mettre son champ de sel partout, ses cristaux de poussière, ses fleurs de sable. s'il te plaît ne dérange pas la crinière du songe qui te recouvre, laisse tes cheveux blonds flotter comme une voile légère, comme une lèvre que le vent soulève. Je te vois, tu sais, je n'ai pas besoin d'être là, avant de partir j'ai mis ton parfum dans mon agenda, j'ai mis ton parfum dans ma mémoire, c'est un dépôt, c'est une fleur, et je te sens, tu es dedans moi, tu fleuris, tu composes, j'entends ta musique, alors travaille encore, ça te rend belle en pensées, dans mes paumes linéamenteuses ça met des rimes, plein les lignes. Tu es mon alexandrin.
Je peux tout faire, et je ne ferai rien, je veux décevoir. Je veux être un traitre à l'attente, trahir, que l'on me dise des mission, que l'on observe un rendement, que j'imite le sang des ruisseaux. Au moment de l'action, je veux me dérober à elle, lui dire « j'ai une peau anguille, comment faire ». Décevoir le monde entier. Je veux décevoir les professeurs, je ferai des petites choses, je ferai de la petite couture, j'écrirai des libelles au lieu des pamphlets et des mirlitonades en place de sonnets. Je peux tout faire, tout dire, j'ai du style, "tu es un poète avec une gueule de poète" et Camille me dit "j'ai rencontré quelqu'un, c'est tout ton inverse, il est beau comme tu es laid, vulgaire comme tu es élégant". Je suis capricieux, je ne peux pas me courber, j'ai les os solides, j'ai les muscles crispés comme des larmes dans l'oeil. Qui peut les faire céder, je donne deux vers d'eau. Je ne sais pas me laisser faire, je ne peux pas. Quand on me demande quelque chose, j'ai un souvenir qui dit "Résiste" je crois entendre la voix de Marguerite qui m'abuse, je crois la sentir qui menace mon ombre. Qui me dit "j'ai un otage, résiste". Je résiste à tout, je ne sais pas obéïr, je n'irai pas en prison. La voix de brume de Marguerite, son souffle toujours dans la buée, toujours prêt à disparaître sous le nuage profond de la fragilité, Marguerite a la voix grave, elle me disait, courbe tes treize ans Jonathan, et je ne savais pas, je m'appelle Najib, comment répondre "je m'appelle Najib" quand personne ne le sait. Courbe ta nudité Jonathan, montre moi tes os de pauvres, tes muscles de pauvre, elle peignait la misère, elle peignait le Christ. J'ai les cheveux longs depuis, et une gueule de poète, et l'élégance et la laideur, je peux tout faire tout dire, je peux aller au bout du langage, je peux affronter les monstres qui s'y terrent et reprendre les joyaux. Comment peut on être fébrile de rater un emploi, de passer à côté d'un examen. La vie c'est ailleurs, la vie c'est plein de menaces, de bêtes, ça grouille, on entend les najas se faufiler dans des plaintes, on entend les pas en coton des brutes fauves, on entend, on entend la vie à côté, c'est la porte voisine, c'est l'autre avec ses jungles de miel, avec ses couvertures en ivoire, avec tout son danger. La vie, c'est ailleurs, la vie on s'y tient chaud à deux, on dit "le matin, quand tu pars au travail, tous les matins où tu te lèves sans moi, où tu m'oublies pour aller en dehors de la vie, je me déchire, je me sens abîmé, quelque chose de moi qui part, qu'on m'ôte brutalement. Ton travail, tu sais, c'est une arme qui sépare des siamois, c'est Moïse qui fend la mer rouge, et qui ne se rend pas compte de la douleur des amoureux qui s'y tiennent des coquillages pétrifiés. Nous sommes partagés, quand tu te rends plaider J'ai les nerfs, le coeur, le sensible, tu as les muscles, le cerveau, l'intelligence"
Lucie a des yeux bleus faits par des fleuves, on dirait de la peinture au couteau, quelqu'un est venu, il a vu une source claire et l'a déchirée, c'est son visage la lumière, ce sont ses yeux les crimes. Des objets de délit, des brillants dérobés. C'est ouvert la lumière, elle s'y déverse entière, et parfois je vous jure quand elle pleure Lucie, vous noie, ça vous recouvre, personne ne peut supporter autant de couleurs ruisselantes et graves, autant de tristesses dégradées comme des eaux sales. Lucie a la beauté des veuves elle m'aime, elle apprend à parler Khmer.
Je ne ferai pas d'efforts, j'écrirai des livres plein de scandales, je leur mettrai une silhouette qui disparait au coin des rues, qui pose des bombes dans les conventions, la couverture vous résistera et les images vous assiégeront. Je veux piéger le lecteur, je sais bien faire ça, ne lui laisser aucune chance. Je veux mettre votre innocence à genoux, je veux que vous sachiez. Je suis libre, je ne me laisse pas faire. A l'école je vous oublie, au travail je vous ignore. En attendant je vous trompe. j'écris sur vous les mots que vous ne savez pas, je prends vos ligaments pour en faire des reliures, je prends vos nerfs éteints pour les caractères dorées de mes titres. J'ai un nom de chapitre, j'ai un nom de chapitre, on le dira commerce, on le dira Lutte. Personne ne sait. J'ai une terreur depuis treize ans, une terreur pour les filles aux yeux bleus. Leurs regards de Marguerite, personne ne sait. je suis un enfant égaré.
Il n'y a qu'à l'amour que je peux tout céder. Qu'à l'amour même que je ne peux pas renoncer.
« Toi dont les bras ont su barré sa route atroce à ma démence »
Les gravures de l'aube
Toute une nuit
La nuit est l'hermine du poète.
Si tu fermes les yeux tu peux voir deux initiales, pas des lettres comme ils font avec des signatures incestueuses et pleins d'argiles non avec des mots pleins d'essence comme le monde peut prendre feu . Tu n'aurais pas une envie, comme un baiser qui se dévoile ?Vous n'auriez pas une idée pour que le monde prenne feu comment cacher son visage dans le nid c'est le métal en plein jour M'exprimer ? Quelle drôle d'idée Des signatures c'est sur y en aura pas. quel homme censé voudrait connaitre comprendre savoir qui il est Le repère à fuir toujours le repère repère repère vous pouvez répéter je n'ai pas compris lesens de la question Je la trouve agitée cette question M'exprimer ? je n'ai aucune idée de ce que ça veut - dire, dire, dire Je suis une femme mais non non c'est pas vraiment mon genre on pourrait mais on ne sait pas c'est sur il y aura des cris au fond tu le sais Oui oui oui au fond les roues des camions les bouts de verre de bouteille tu peux les cacher dans ma gorge Le mythe c'est ça le Mythe je me disais aussi c'est pas normal de vivre ici C'est sur ton rire arbitraire c'est où nulle part où tu vas chercher ça ce nom Silence Reprends ta respiration tu l'as laissée s'échapper dans mon cahier ta respiration là partout Papa ça l'empêche de respirer "Il y a trop de respiration ici" On agonise j'écris plus je tente de m'exprimer est-ce que tu comprends ce que je veux dire ? Je suis dévoré plein d'hémorragies internes de crises douloureuses dans le cortex cérébral plein de nudités d'esclaves dans mon coucher de soleil plein de maladies sans solutions de médecine sans noms tu comprends ce que je veux dire tu comprends ce que je suis ou pas je suis plein de soufre et d'hydrocarbures plein de Je sais que je suis capable detuer plein de ça tu vois capable de tuer je sais oui plein de dérèglements de races et d'imprudences Et pourquoi en tête à tête Qu'est-ce qui s'est passé Je sais pas je sais je suis capable de tuer Je suis plein de clefs qu'on arrache de choc violent Le moteur des bateaux dans le visage ça te fait quoi Est-ce que tu voudrais que je te jette à l'eau là puisque tu le fais pas Il faut toujours une chute pour débuter une histoire. Autrement on se regarde là, et on fait comme si ça n'existait pas, comme s'il n'y avait rien, comme si on ne se voyait pas. Pardon, je n'ai rien entendu. Je te parle pas de commencements je n'ai pas de temps commencer finir c'est pas mon problème Tu voudrais que je te fasse déraper d'une marche et de ta morale Au pire tu saigneras et t'auras la mâchoire sur le côté mais tu comprends les histoires pourtant il faut qu'elles soient fortes pour être vivantes, sinon c'est la comédie, sinon c'est vulgaire, c'est comme les autres Je voudrais que tu me fasses pleurer jusqu'au décollement de la rétine ça sert à rien de pleurer c'est pour les arbres ça C'est terrible parce que tu me fais vraiment trembler. Les gens qui font trembler tu vois c'est rare je suis en train de le dire aux passions de m'attendre. Faudrait peut-être qu'un jour grand-mère pense à mourir parce que c'est sur on peut rater sa mort je le dis à maman tu vois maman elle me fait trembler, elle a l'air réelle je sais pas si elle comprend elle a pas l'air est-ce que j'ai l'air d'être une femme moi Regarde et toi tu comprends quand je dis que les gens n'existent pas M'exprimer ? C'est ce que je suis en train de faire Les gens demandent toujours qu'on les laisse tranquille ça me donne envie de pleurer maman c'est tellement triste Sujet :Silence Qu'est-ce qui fait que les gens sont silencieux Et les morceaux de politique dans ton assiette tu les manges pas pourtant c'est trés bon pour ce que t'as Quoi Qu'est-ce que j'ai à part des idées T'as une jeunesse.
C'est sur des signatures y en aura bas les contrats.
Personne ne sait à quoi ressemble la nuit.
Solécismes soliloques.
Les crises falsifiées
Dilettante.
A défaut de D. tu seras le journal à la peau de sel pour mes
insomnies. Je ne veux plus t'entendre bourdonner, chut, tes bavardages
sont de l'ennui, on croirait que d'un même festin les morts se sont
éveillés. Ta bouche s'ouvre, c'est une tombe qui baille. Il faut la
clouter, la clouter de mots pointus comme des nerfs taillés par la nuit.
Elle est une serpe aux effets magiques, capables de tailler dans le
vert d'un oeil des géométries d'étonnement. A défaut de mon almanach qui
s'est égaré dans des jupes colorées, en l'absence de marbre tu seras la
pourriture sur laquelle mes doigts glissent des sons insensés. Tu
entends ? Ce n'est pas le galop du jour, c'est le délire de la nuit, ce
sont ses boules mauves et mortelles qui roulent comme des nodules. Ta
bouche je te la ferme avec des bulles de cire, c'est une voix de pape,
ton corps, tu es le papier jaune et muet des iniquités.
Assassine, va mordre avec ton visage de plastique vert, avec tes désirs de nylon, dans un étranger. Je veux, je veux ton front terrassé, les poèmes purs, je veux, les baptêmes dans des lacs taris, trois minutes sous l'eau, j'ai respiré l'oxygène des noyés. Mon sang remue en agonie. Et ma vie absente. Suis-je ici ? Est ce que j'apparais dans vos réalités. Je sais, je sais, dehors il y a des secondes qui s'écroulent, et tous les morts dedans, qui pleurent. Je sais, j'entends les cris du temps, l'horloge qui se plaint sur le moyeu de l'horloge aux chiffres froissés. Je sais, les feux iconoclastes, les transes des barbares, je sais, je sais les cris, la furie, et le prénom de l'abandon. Est-ce que j'ai un corps, encore ? A répéter des prières ? Est ce que j'existe ? non. ce que vous voyez à mes pas, c'est un orphelin. je suis un orphelin, sur la scène, je m'adresse à vous. Mais je n'existe pas. Je suis un enregistrement. Je passe en boucle. je suis une tirade qui n'en finit pas, au milieu de la scène, de succomber. Je suis tous les héros morts,toutes les villes défaites, je suis Rome, Carthage, Constantinople, je suis Paris, César dans la trahison de Brutus, je suis Hamlet au sang blême, Rodrigue aux spasmes.
Si je n'aime plus, si je ne suis pas amoureux, je disparais tout à fait. S'il te plaît, toi, toi que je sais, toi qui sait bien désormais que je t'aime, ne m'en veux pas. Ne m'en veux pas des étrangetés du ciel que je rabote, des orages en sucre que je fais décroître comme une vulgarité. Ne m'en veux pas de l'écrire et d'en priver, ne m'en veux pas de t'inquiéter, ne m'en veux pas de te faire revenir ici, dans tes pas silencieux, on croirait que tes yeux me lisant dansent, ou épient. Aimer, c'est ma seule réalité, c'est l'apparition soudaine de mes organes, je me sens des reins de vapeur, je me sens un coeur de friche, je suis prêt à l'éducation, prêt au labeur, je suis prêt, je sens mon être fleurir, et mes narines de coquelicot et mes côtes de Rhône, je sais mes mains d'étamines et mes poumons d'aube. Je suis en train de pousser. Attends, s'il te plaît, j'ai le corps qui se remonte, tout l'amour est ma fabrique, et mes yeux fument.
Tu sais. Je n'ai que deux champs, que deux horizons, les bois, et la mer. Je suis le pin sec et la marée inflexible. Je recouvre. Obstiné comme le ciel. Tu sais. L'aube maline, avec ses teintes amères, vieillies en fut, tu sais son visage de pourpre. Quand il sèche, quand il casse, que c'est le jour tout à fait, je te dis, le bleu de la mer est le vin séché du matin. Qui lui coule dessus. Qui empiète. La marée est une nappe.
A la jointure des deux, les sutures de mes mondes, c'est l'algue, l'algue empoisonnée, l'algue violette qu'on ne mange pas, l'algue aux milles blessures, le mortel onguent qu'on applique aux plaies satisfaites. Je sais mon étrangeté, et mes silences brusques. Je feins des départs. Mais je n'existe pas. Je fais semblant. Ici, mon ombre imite un corps. J'emprunte une attitude. Je me positionne dans le train dans l'angle bizarre de vos désirs. Comment désire-t-on un corps humain ? J'ai fait des amantes un jeu, j'ai fait des amours une guerre. J'ai deux-cent-vingt-huit filles qui m'ont joui dans la peau. Je n'ai rien senti. Le vent. Les caprices. J'ai tout oublié. La mémoire se décompose, c'est un corps usé. Les souvenirs se dégradent. Les souvenirs sont de la poésie écrite à la salive des merles. Je prends vos formes, j'emprunte à la matière. Quand je couche avec une fille, c'est pour y piller un peu de l'odeur que son cou entrepose. Quand j'embrasse un garçon, je lui dérobe un peu des muscles superflus, tendus au-dessus de l'extase. Je n'ai pas de corps. J'ai une apparence. Ne me touchez pas, l'hiver pâle, grésillant me couvre et me découvre. Quand je souris, c'est que j'ai vu à l'intérieur de vous, des civilités. je suis un acteur. un acteur sans corps. je suis le costume. Tu sais. Toi, jen e parle plus qu'à toi, je n'écris plus que pour toi. J'ai toujours été absent. Mon absentéïsme me définit, me construit. Je n'ai jamais été présent. Ce qui me recouvre est un habit d'Arlequin fait de pièces de toutes les époques, je ne le veux pas joli, je le veux utile. j'ai le corps efficace pour le scandale. La seule chose que je partage avec vous c'est une voix. Une voix que je drogue, le matin, pour qu'elle perde de son influx de cavernes, qu'elle semble de votre époque. Je puise dans vos usures, le sortilège de l'habitude. J'imite bien. J'ai vingt-deux ans de voilures. Je suis une corvette. Avant de monter dans le tramway, pour faire de la place au milieu des empressements, je la fais s'exercer ma voix, suer son arrogance, transpirer sa sauvagerie. Je peux être normal, dit mon sanglot au reflet. Je peux vous imiter, je peux me rassembler, je peux me concentrer, mettre dans une fiole de chair, toute l'essence dispersée de moi-même et en classe y mettre le feu. Toute les nuits j'immole.
Je fais des études inutiles qui sont la fiole de mon existence. Un lit. Je me renonce, tous les jours. Je fais un pas de côté hors de moi-même pour appréhender cette dimension particulière, du faux. Les paroles synthétiques. Comment leur dire. Je sais la couleur du mensonge, je suis synesthète, je ne sais pas ce que vous dites, je ne suis pas intelligent, je comprends la nervosité, je vois en rouge le mensonge.
Ce que je partage avec vous, ce qui nous est commun, ce qui me rend humain, n'est-ce pas d'avoir une voix. une voix qui fléchit, qui décline, à deux heures elle a des allures vermeil et des ivresses de Bordeaux, avant elle est douce, avant ma voix caresse, tord et vrille. Je sais faire vos sourires, je sais faire vos joies, mais je ne sais pas la colère. Apprenez moi les teints honteux, apprenez moi les manies, apprenez moi à être laid, et bas. Ma voix, je l'exerce, je la jette dans une foule, et je regarde comme elle se débat, comme elle pousse, comme elle crie. Je la regarde gesticuler, ma voix. Se déformer, se sublimer dans le contact de vos atmosphères. Tandis que mon corps d'éther suffoque. J'ai des sens, je vous conquiers par les sens, mais je ne suis pas là. Je n'ai pas de corps. Ma mère m'aimait si fort, qu'à la naissance elle a retenu dans ses ovaires la matière, elle l'a retenue, et n'a laissé dehors que l'âme, que l'idée, de moi, la voix, et les nerfs. J'ai deux petites soeurs et un petit frère, et je vois, en rassemblant leurs géographies, mon corps. Je suis absent de moi-même. Je me vois. Les dîners familiaux sont une caverne de miroirs. j'ai trois reflets mais pas de corps.
La bouche de H. recèle mon crime quand elle baise mes lèvres. Elle jouit d'une escroquerie. Je suis imprescriptible. Je dis, elle a la tendresse délictuelle. Mon corps je l'ai soustrait à un mort. Je me suis déterré le visage. Il ne le sait pas, le mort, que je lui dérobais son corps, je lui disais, quand il flottait en jouant des lyres sur son marbre, que j'étais un ange, un ange au visage de tentation. Je lui disais, il faut le laver. Je lui disais, ce corps, j'y ferai une nouvelle onction, la salive des filles. Depuis je cherche les regards bleutés qui vibre comme des électricités. J'aime les yeux bleus, on croirait le vingtième siècle dans la nuit.
Je suis fascinant. Mon absence est fascinante. La lumière disparue, chérie, dessous son mythe d'aurore. Je suis fascinant et je vous vends mon orgueil. Il vaut une fatigue. A la première enchère au goût de sommeil, je me cède. Au premier pas de torpeur, j'abandonne. Offrez moi un corps, vos lits-cimetières. Vos chairs tombales que j'y pourrisse avec vous.
Les musiques galbes
Rose de plaisir ; épines de mélancolie
cette incapacité au sommeil qu'il y a dans l'acte d'aimer
Je me mets à table et je crache
du sang. J'aurais voulu te protéger, tu sais, comme on se recouvre
de calme, pour passer la nuit. Eviter l'écriture qui suce la vie.
Qui la barre. J'ai des ratures, dans l'être, en barreaux. Ton
absence est ma cellule. Sur les murs, je griffonne, trois traits
tranquilles. Qui se relèvent. Décoiffés.
Il y avait des caméras
éteintes, sous les tables. Des chats qui crèvent dans des sachets.
J'ai lu, quelque part, dans un corps, qu'il faut arroser l'arbre.
Liberté, c'était écrit dans l'invisible. Des prisonniers qui
soufflent et qui se tiennent la main. Ce sont des images qu'on
t'offre comme du feu. La voisine a beau se concentrer, elle perd son
bleu. J'ai dit à Margot « Tu avais les yeux sombres qui ne
peuvent offrir que des passions molles ». On t'offre des images
concentrées, fantastiquement. On te souffle des tempêtes en
plastique, avec des branches cuites et des orages en nylon. Le vrai,
ici, à la porte des bras. Et il y a un homme, qui va bientôt
mourir, sa peur est grande ouverte, sa panique coule entre ses dents,
il va mourir. F. Ce sont les anonymes, qui meurent. Ils sont en
miniatures, dans les cadeaux bien emballés, ce sont des jouets de la
violence. Des images qui s'échappent, d'un sac poubelle en fer.
Froissée dans la salle de bain, la maman aura beau se concentrer,
elle perdra son sang. La mer, on te l'a inventée, tu peux passer en
dessous, si tu te concentres sur ma main. Il n'y a pas de soleil qui
parle aux enfants, il n'y a pas de poésie, il n'y a que de la
concentration. Quand je me réveille, il y a du sang sur l'oreiller,
des flammes dans les baisers. Il y a la Grande Gueule du ciel, qui
avale nos têtes. On te suçe le ventre, et je ne voudrais pas te
voir rire. J'aurais voulu te protéger. Il y a une porte au bout de
la rue, où il est écrit "la révolution pluvieuse". A
l'intérieur, le brouillard, et le plafond, qui pleut. Un bossu qui
vous accueille, avec le drapeau de sang planté sur la bosse. La
révolution, c'est par ici, Madame. Détendez votre bouche,
déshabillez votre peau, fermez vos yeux, c'est dans le fond du
magasin. Ici, on ne se protège pas. Ici, c'est la vie dans tous ses
états. Une main béante, saignante, puante, pendue en plein milieu
de la pièce, à une corde pleine de mouches. Tapez dans la main,
faites tomber les derniers ongles de la mort. Gardez vos yeux fermés.
Les épées sont noyées, les guerres sont achevées. C'est l'endroit
de la révolution. Les moeurs sont humiliées. Vos tabous sont
décapités. Est-ce qu'il est temps d'avoir peur. Il était, écrit,
liberté, dans l'invisible. La peur, en dehors d'ici Madame, on ne la
ressent plus, dehors ils sont morts. Morts. Vous voyez ce que je veux
dire. Ils mettent des gants pour faire l'amour. Les mains sont
sourdes de ce qu'elles ne peuvent attraper. Le peuple enlève la tête
des ennemis, avec un tire-bouchon pourri. Et toutes les têtes,
toutes, sans exceptions, même les exceptionnelles, toutes, servent
de tapis. Dehors les scènes se répètent sans fins. Et ça, ça, on
en a conscience, dehors ils le disent comme des automates, comme des
monstres eux, ce que nous ne sommes pas "ce que je vis, je l'ai
déjà vécu, ce que je dis, je l'ai déjà dit, ce que je fais, je
l'ai déjà fait, ce que je ressens, je l'ai déjà ressenti, ce que
j'ai avalé, je l'ai déjà avalé, ce que j'ai pleuré, je l'avais
déjà perdu". Et nous on découvre, nous on invente entre nos
yeux, les mots, la vie, la paroles. Mais dehors, les morts n'ont pas
d'action. Les jours s'accouplent avec les nuits accroupies dans un
ennui de morgue. On s'ennuie avec les morts Madame, on s'ennuie. On
retrouve leurs bouches dans leurs bières, et les jambes des femmes
assises, se fendent quand elles se lèvent. Le sexe des femmes debout
se cachent dans des artères en bois. Le sang, il n'y en a plus
depuis longtemps déjà en eux. Dehors ils n'ont plus de piles. Ils
ont des oiseaux affolés dans leurs usines, des flèches dans leurs
cheveux. Ce sont des morts, qui ont vécu cent morts. Ils se tuent
entre eux, mais ils sont déjà morts. Des morts, avec des deuils
dans tous les coins de leurs pièces. Ils n'ont plus de place, dans
leurs lettres. On retrouve des Dieux un peu paumés dans leurs
urines. Ils se pendent à leurs canapés dans leurs rêves les plus
fous. Ils ont des désirs conçus dans les mystères de l'ennui.
Leurs taureaux n'ont plus de cornes. Comment voulez-vous qu'on
éventre, leurs vies. Ils se protègent de tout, dehors. Bien sur,
ils ont des ivresses minuscules, des esprits souterrains, des foetus
haletants dans leurs draps. Ici, tout ça, ça ne suffit pas. Ici,
vous êtes dans le magasin de la révolution. Et si il pleut, c'est
justement, pour que l'on ouvre pas, les parapluies. Ici, on ne vous
surveille pas. Les règles sont sans dessus sans dessous, à l'oeil
des exhibitionnistes, sans sens. Les remparts sont fondus à la
bougies, et la mort est une bactérie de rien du tout. Sans cesse
sans cesse sang cesse cent cesse sans cesse, cessez. On bégaie vos
morales, dans une salive masturbée. Ici, c'est écrit. Liberté,
dans l'invisible. Tu vois, le bossu, il m'a demandé d'appuyer, sur
sa bosse, et une poussière immense est sorti de sa bouche à toute
vitesse. La Révolution, poussiéreuse. Celle dont on parle depuis
des siècles, celle qu'on retrouve dans les livres, et dans les
bouches, mais celle qui ne vient toujours pas. Il y a des remous dans
mes genoux qui claquent sous la table. La révolution me fait du
pied, dans un monde trop petit pour nous, ils ont filmé, je te
protégerai Ma plus grande foire, tu sais, c'est ma révolution
intime. Mon plus grand défaut, c'est d'être vivant sans être
concentré, sur la vie. Tout ce que je peux offrir, c'est cette vie
là-, tendue au dessus d'une rivière qui s'effondre. Je croyais
mourir au vingt-huit de février. Je vais retenir un peu ma
respiration, l'allonger. Je ne veux pas faire pitié. J'irai mourir
au premier novembre, au milieu du reste des morts. Je deviendrai un
souvenir. Je te tiendrai chaud, j'espère. Mon silence.
L'angoisse de tes mains d'aube fine.
Tu sais Amour, Dieu est entré dans la chambre.
Il a déposé ses valises sur le palier. Et il m'a déshabillé ses rêves. Là, j'ai serré mon poing dans le fond de ma poche. Et je le faisais tourner. J'ai mis ma peau en miettes. Tu sais Amour, j'ai retenu la phobie.
Dieu est entré et il avait une carapace. J'avais de l'orage dans la bouche, et toutes les feuilles sont tombées sur la parquet de ma chambre. J'avais une tempête dans le coeur quand Dieu est entré. Des toits d'espoir se sont envolés. Je ne sais pas s'il y a eu des morts Amour, mais mon linge de nuit est tâché. De flaques.
Dieu est entré, il était sec, il avait chaud et soif.
J'ai le ventre viril Amour, j'ai pas eu peur, j'ai reçu le coup de poing. J'avais le parfum liquide, et je l'ai laissé passer. Dieu est entré, il a regardé le plafond, et des muscles serrés pendaient au ciment. Mais tu sais Amour, je maitrisais l'agression. Je maitrisais ce qui entré, et qui s'installe.
Il a ouvert les fenêtres, et des bouches gluantes frappaient à la grille. Il avait 10 jours Dieu. Il avait 10 jours.
Je respirais l'épreuve. J'ai le siècle rouge, qui perle Amour. Mais j'ai retenu, tout retenu. Il m'a déballé ses espoirs, sur ce lit, là, dans cette chambre. Je suis tombé sous ma peau. Dieu disait les hommes, les femmes. Tu sais Amour, je suis riche, Dieu est entré, j'ai perdu mon lait, j'ai cogné ma phobie contre ses os cassants. Dieu est entré. Il a défait les draps. Il a plissé mon coeur. Je t'en prie, regarde, regarde, Jérusalem sous le sang. Et la crèche qui frotte la poitrine. J'ai retenu le fauve Amour.
Il a troué mon lit de lumière.
J'ai caché mes cuisses bouleversées. Il a cuit mes envies Dieu, et j'ai une écrivaine dans le miroir. Une écrivaine avec les mèches blondes sur les lèvres, quelque chose qui empêche. Amour à l'odeur de novembre est entrée, et j'ai voyagé Amour. C'est vieux l'histoire du monde. C'est précoce, mon histoire par rapport au monde. Et je roule, sur sa langue, intime, intime, intime. Oppression. Intime haleine Amour. De Dieu, l'haleine merle J'ai retenu mes tremblements, j'ai mordu la queue d'Adam, j'ai tressé les cheveux d'Eve. Il demande du sucre dans le café, il demande du feu pour réchauffer, il demande de ne pas abîmer, il demande d'éteindre la lumière pour tuer. Dieu. Avec un grand "D", avec un grand chapelet avec un grand trajet. Dieu qui vient de loin, qui est si prêt. Il a enlevé sa peau Dieu, il avait trop chaud, il insiste. Étouffé. Étouffé. Brûlant. Étouffé. Il insiste et il enlevé sa peau. Il est sans chair. Ca brûle tellement en moi, que j'ai fait honte au Sinaï. Dieu est assis sur mon lit, sans chair.
Je me suis assis à côté de lui Amour.
J'ai mis des religieuses dans son café. Il parle du mâle, de la guerre, il parle du mal, et des prières. Il commence à s'ennuyer Dieu, il baille. Il tousse. Étouffé. J'ai retenu la phobie. Il est resté une nuit, sur le lit. Il a dit "déconne pas".
Il a déballé le monde comme un chien qui s'agite.
Il s'ennuyait. Il s'étouffait. Il est venu Dieu. Sans frapper, il est entré. Et j'ai retenu, la phobie de la vie Amour. J'ai retenu, la mort qui voulait m'emporter. Maintenant, il est reparti, comme le Petit Prince, comme un oiseau qui piétine les amantes et le corps méprisé. J'ai retenu, la terre brûlée des morts.
Dieu est entré, il est reparti, j'ai éteint la lumière, fermé les rideaux, découvert ma peau, je suis sensible.
Comment te dire. Je sais qui tu es. Quand tu fredonnes ici. Ce que j'ignore, ce sont tes pensées. Si tu te moques, si tu t'étonnes, si tu viens ici comme pour épier à travers les soies du bordel les vices qui s'y entassent. La différence. Je ne sais pas. Les habits que tu mets. Avant. Je crois. Dieu m'a dit. Les comtesses, mettaient, des guenilles en ruban pour imiter les rouées. Je ne sais pas. Si tu viens ici, pour te glisser, dans la palpitation de mon cœur anormal. De mes artères gorgées. D'urine. J'ignore si tu le partages à d'autres, en des moqueries, j'ignore ce qui se déroule à l'intérieur de toi. J'ai cru entendre une rumeur ? Je ne suis pas sûr. Elle tombait, en grésillant, sur la nappe. Elle tombait, la rumeur, et je crois l'avoir vu dormir, dans des yeux. Perfides.
Je sais comme ton corps se plie la nuit, au sommeil, comme il se paralyse soudainement, je tes doigts qui appuient sur les yeux de la peur, je le sais. Je sais toujours, qui sont les gens. Malgré les kilomètres je lis une âme humaine, j'en tourne les pages, je lis à la vitesse des morts. Je déballe les mots. Sous le silence, je te devine, sous la gaze de la distance je sais l'entêtement de ton parfum. Il se dépose, s'accroche, sédimenteux, douloureux. Tu froisses ma paranoïa, c'est extrêmement douloureux, mes inquiétudes. Tu te transformes. Tu deviens, l'obsession. L'obsession, et tu jettes dans le même regret que Dieu son fils, dans moi de la peur. J'ai peur de toi. Je ne peux rien dire. J'ai le nez fier.. Ta coutume est de tout déchirer.
Insomnie amie.
On tombait, la première fois qu'on se retournait, dans l'insomnie, des nuits entières, car la fatigue, dans la solitude de la pièce, survenait toujours en fin d'après-midi, ou tôt le soir avec le crépuscule. D'autres ont déjà raconté l'insomnie : comment, à la fin, elle détermine même la vision du monde de l'insoumis, au point, qu'avec la meilleure volonté, il ne peut plus voir l'existence que comme un malheur, toute action comme dénuée de sens, tout amour comme ridicule. Comment l'insomniaque reste étendu là, jusque dans la lumière blême de l'aube qui pour lui ne signifie que malédiction, malédiction qui le dépasse, lui, seul dans l'enfer de son insomnie, malédiction d'une espèce humaine manquée, reléguée sur une plan te qui n'est pas la bonne...Moi aussi, j'ai été dans le monde des insomniaques (et je ne cesse d'y être maintenant encore). Les premiers oiseaux dans l'obscurité encore, juste avant le printemps, et déjà on entend Pâques avec le timbre, cette fois, sarcastique, suraigu, vrillant vers le lit de la cellule, ce « unenuitsanssommeilencore . Les cloches qui sonnent l'heure, tous les quarts d'heure, même les plus lointaines, nettement audibles,annonces d'une nouvelle mauvaise journée. Les cris et les miaulement de deux chats, l'un sur l'autre dans l'immobilité,signe sonore et net du bestial au centre de notre monde. Les soupirs ou les cris, prétendument de plaisir, d'une femme, soudain surgis dans l'air fixe, comme si, juste au-dessus du crâne de l'insomniaque une machine démarrant produite en série, en appuyant sur un bouton, comme si tout à coup on faisait tomber tous ces masques de sympathie et faisait apparaître au grand jour un égoïsme panique (ce n'est encore une fois pas un couple qui s'aime, mais chacun qui s'aime lui-même, à gorge déployée) et toute méchanceté. Périodiques états d'esprit de l'insomniaque – mais ils peuvent être définitifs pour ceux chez qui l'insomnie est constante, devenir des états réguliers.
J'ai du soleil au coeur
Quand vous en serez au temps des cerises,
Si vous avez peur des chagrins d'amour,
Evitez les belles !
Moi qui ne crains pas les peines cruelles
Je ne vivrai pas sans souffrir un jour...
Il y a une solitude dans l'écriture qui vous rapproche des autres.
J'invente une prière qui dit : " j'achève les enragés "
Je suis une fuite organisée. Hitler dit qu'il a les parties sexuelles si fragiles que mon corps qui le frôle le rend fou. Je n'ai pas le langage humain. Je dis "vous devez confondre" à une dame qui perd sa peau sur des toilettes. Je rencontre une fille qui pleure de rire, dans la nuit, je l'imagine mourir. Il y a un gardien de musée dans mon crâne. Les oeuvres sont intactes. La grande table ronde d'un bleu nacré. Les coupes de champagne qui se brisent sur mes gencives. "Tu ne bois pas ?". Non, je m'offre. Je m'offre aux sourires bourgeois, à des femmes aux âges de mère. Je veux de la tendresse. Je n'aime pas les sexes éventés, je n'aime pas l'argent. Papa Je pense qu'un jour il ne sera plus là. Alors je serre plus fort, je retiens le parfum, la peau, le gôut, l'assurance et la fragilité. Je retiens tout de Papa, comme un souvenir qui se consruit sur le moment. J'ai eu raison hier. A elle aussi. Je dis que j'ai le sang de mes origines, les yeux noirs, les cheveux sombres, la peau mate, tout écarlate de douleur. Oui, mais ça reste dans le sang. Ce qui recouvre mon corps c'est le vent du Nord, sa pluie sur les visages exacts. Moi, je suis fait de l'odeur de la mer agitée. Mon amour. Mon. Amour. Là-bas. Je suis serré dans l'air chaud. Dis moi la neige qui grelotte sur tonparvis. Des chansons berbères je ne comprends que Béjaïa. Des sourires de mamans je ne retiens que la douceur de mon prénom. Dans la glace, je caresse le ventre plat de ton reflet, je l'imagine rond comme la langue amoureuse accessible. Mon amour, il faut apprendre à tout perdre. Là bas, je dis "je déteste les regards". Je suis sans réel désir. Je suis une décoration. Si on me laisse un message. Je ne rappelle pas. Il est loin, il manque. Si l'on m'écrit, je prends mes doigts,et je réponds, automatique, j'ai toujours le dernier mot, un dernier mot de politesse. Je veux être insupportable, je veux être en dehors des autres. Je veux être ce sordide que l'on épie, qui nous menace. Je veux être insupportable, que personne ne m'approche trop près, que mon souffle reste avec moi. Et puis, la maman de Lisa lui dit "tu as une lettre de Jonathan qui t'attend à la maison". Je ne résiste pas, à l'écriture, aux mots. Elle pense "il est très fort, il a deviné. Alors il a écrit, il sait que je ne contrôle pas". J'imagine les corps dansants, là bas je nous ai vus. Toi défaire l'anémone de tes cheveux, le noeud des paysages. Je déteste l'attitude des filles qui veulent séduire. La forme de leurs corps quand elles s'apprêtent à aimer. Elles grandissent, prennent de la place comme un coquillage géant, gluant, salé, puant, et délicat. Fruit de mer. Elles germent, dans les petits désirs, les petits amours. Moi,je voudrais me cogner. Je voudrais qu'on me prenne le bras, dans le fond d'une rue et qu'on me tire les cheveux en me criant "voilà, c'est ça l'amour". Tu le ferais, un jour avec tes mains d'été ? J'attends que tu m'appelles le soir, je me dis "elle a du boire, elle le fera, elle le fera indignée, en me disant arrête, arrête tout ça, j'ai tes images dans la tête et je ne les supporte pas" .Sourire tendrement. Hitler aurait pu le faire, s'il n'était pas aussi bête. Je dis toujours "laisse, ils sont tous cons". Je souris et je pense : dire que je l'ai tué J. L'odeur des douches publiques, et le bruit des moustiques fatigués, quand les cheveux blonds animaux se collent à moi sur Waters. La musique est bonne. Quand la musique est bonne. Il dit "j'ai trop saigné ". J'aimerais voir. Je veux toucher. Moi aussi, je saigne souvent, j'ai les gençives fragiles. Je ne veux pas être comparé à mon écriture. Je ne vis pas encore comme j'écris. J'inspire N. Elle me dit "tu m'inspires". Je l'inspire. Je me demande, comment, et où. Je croyais que je suffoquais. Et puis, je ne pose plus de questions. Que la nuit me pardonne. Les gens sains m'ennuient, les gens sains sont vides, moi je suis pur. Je suis le tout de ce qu'on lit de moi. J'aime ce qui dit "je suis timide, mais sauvage". Le téléphone explose, je ne réponds jamais, le téléphone raconte. Les boîtes. Les filles. Les baisers. L'intime. La virilité, les urines. Puis le renversement du coeur. Le désenchantement. Les regards vulgaires. Il raconte. Elle, elles, eux. Mais jamais toi. Les mains sur les hanches comme des pierres sur un arbre. Tombales, évidemment. Il dit "Marie, le surf, la plage sous la pluie, les rues du Nord désertes sans toi, les nuits blanches à danser, la musique, l'alcool, je prends jamais comme toi, je prends pas de limonade moi, je veux vivre ma jeunesse". Ma mère, a un rire étranger au téléphone. Je déteste Cergy. Je n'ai rien à dire à leur dire. Ils disent toujours "parle moi, écris moi". Moi je n'écris plus qu'à une, un peu sourde, elle a des nymphes dans les cheveux, de l'hiver au regard. Mais je ne lui dis pas, parce qu'elle s'en irait si elle savait tout. Je me dis qu'elle sait, et ça m'amuse. Ca m'amuse parce qu'elle n'en parle qu'aux autres, autour de moi j'entends le frottis de la rumeur, j'entends ses habits de fantôme et ça me fait sourire. Elle en parle, et la voix me traverse comme une intention. Personne ne comprend, tout le monde est sourd, ce n'est pas avec les oreilles qu'on écoute. Cons. Je fouille le vil plomb de mon corps abandonné qui ne transmute pas d'or Tout se bouscule dans les plumes de serpents. Je suis incendié. Précieux. Tabou. Sûr. Racine. Je tombe de la chaise en éclatant de rire. Je suis une fuite organisée.
E dit "je pense à toi". Elle le dit souvent. Mais je ne réponds pas.
La cambrure de son dos c'est N. pourtant. M. D.. Zurich. J'ai
brûlé mon passé avec nos coeurs unis.
Elle, toi qui part, revient, ma
marée, mariée, son sourire, ses silences, c'est moi. Parce que son
odeur. Haute-décousue. La forme de ma bouche qui aspire la fumée. Un
indice. Le corps anonyme.
C'est violent le sourire du désir.
Quand je parle, j'éjacule de la mâchoire.
Quand ils lisent, je vois leur éducation, et je regrette déja d'écrire.
Loin. Il y'a un conseil taillé au marteau : tu ne devrais pas lire de poésie dans la nuit. Les femmes qui se regardent dans les vitrines, en inspectant leurs cheveux. C'est que le ciel je peux le prendre entre mes mains, le secouer, et vous le balancer à la figure. Je trouve ça ridicule et pourtant, je fais de même : je me regarde. Est-ce que j'espère me trouver laid ? Plus j'entends Baudelaire entre mes lèvres quand je regarde tes yeux, plus je commence à trouver qu'il est tard. Je n'aime pas la poésie, tu comprends. Je n'aime pas les femmes qui se regardent et je n'aime pas la poésie. Si l'on me demande si j'aime les mots, je répondrais que oui, mais ça, c'est une réponse instinctive. Par instinct, j'aime les mots, par principe, je ne les écris pas. Les mots que j'aime, je ne les ai jamais écrits. Je te les dirai, à toi. Les mots. Je les dis avec la gorge nouée. Les yeux, tes gifles, ton impatience visible. S'il fallait que j'écrive un livre, ce serait un scandale sous la forme d'une silhouette, que vous croiseriez dans les couloirs sombres : on sentirait la présence mais on ne distinguerait pas ses formes. Il y a notre différence. Quand j'hurle, c'est sur mes plaies. Parce que tu es avec moi, en pensées, je te sens dans le froissement des pages. Je ne suis dupe de rien. J'ignore ce que tu cherches. Moi je n'attends rien. Je n'ai jamais rien attendu. Même la partie manquante. Toi. Alors quand Maupassant dit "L'homme s'approche", je ris, la littérature m'ennuie. Je n'ai que faire de votre intelligence. Je n'ai que faire de savoir si je suis un homme ou une femme. Je sais que je veille sur toi avec une hache en bois, attendant la sentence. Je sais, la plus belle des destructions La construction, ton existence. Je veux admirer tout ça de loin. Je veux raconter, raconter le lac en moi qui noit les orages. Si je les croise, je leur plante un revolver mou entre les deux yeux. J'attendrais que vous pleuriez. La Vie se taira, et je descendrais dans le ciel pour y retrouver les trains que j'ai raté. Avec toi. Un homme, c'est un assemblage cosmique. La sagesse, est une maladie un peu sombre. Dans les pharmacies, on ne vend pas de médicaments pour les prudents. Prudence, reste anéantie dans ta tâche, moi je ne veux plus me regarder dans les glaces pour savoir si je suis beau, je veux savoir que je suis laid. A partir de ce moment là, je ne perdrais plus de temps, je cours, en frappant dans le dos des beautés immobiles et grossiéres, j'enmènerais dans ma course, les lamentations fades. Défais toi de ton éducation. Arrête de te tenir droite, comme si la courbe de ton dos ne devait pas se casser, sois avachie, courbe tous les os, casse-toi en deux, défais ce que tu peux de noeuds, mange avec tes mains et mets de la terre sur leurs tables propres, mets ton nez dans ton verre, et jette ton assiette à terre, casse, arrête de poser gentillement tes mains sur tes genoux sous la table, met-les dans ta bouche, lave-les après manger, dans la bouche des autres, ne sois pas si fièrei, jette-toi des ponts, trouve-moi misérable, trouve-toi merveilleuse, continue de ne pas idôlatrer ces gens qui sont rentrés dans leurs épaules droites, "arrête de fermer les portes par politesse laisse-les grandes ouvertes" c'est ce je te dis. Qu'on entende tout, arrête de te taire, et parle, parle, dis-ce que tu as à dire, et même, le reste. Quand ils lisent, je vois leur éducation, et je regrette déja d'écrire. A l'envers, ça donne : Vivant il-croit se, mais, probléme de pas pose me ne ça, mort sois je Que. dire rien veux ne je que et mort suis je que dit qui celui c'est, j'enmerde que un bien a en'y il's Et.
"La brume en baisers".
C'est facile de devenir celui dont tout le monde parle. On dit
dans la rue que je suis l'ombre de F. Qu'il était la lumière. Et
quand je tiens le manuscrit dans ma main, tout me revient.
L'échelle
de l'abandon. Le sous-sol interdit. La racine sous la pierre. Le
ventre sous langue.
Tout me revient. J'ai treize ans et je connais
déjà. Les origines de la peur. Le calme de mon corps. Les femmes
sont cruelles. La musique est mortelle. Je suis déjà dans le corps
humide. Le fond sec. Le corps suant, rivière musical. Je suis déjà
l'enfant qui coule. Transparent. Blanche prière. A treize ans, pas
encore percé d'ordres, la seule force dans la faiblesse. Je suis
déjà, une cachette infinie. Je suis une fille à la fente close.
Verrouillée. Une tentation dans le miroir. Maman disait que j'étais
dangereux quand je vomissais Rimbaud devant la glace en pleurant,
comme pour atteindre mon corps. Tu es dangereux. Dangereux et
transparent. L'enfant sans peine. Dans la richesse de l'harmonie. Un
coquillage pétrifié qui respire sous le sable. Sans
bouleversements. Un muscle indien
Et puis, il y a eu la
confidence. Celle qui agrippe au cou. La première. Je te garde sous
les ongles dans un verre de liqueur. Mon début de nuit. Ton visage
doux. Où tout se passe. Un lieu où il faut tout construire. Un
visage colérique et calme. Un alcool. Un visage qui vient loger dans
le corps. Tu diras plus tard, avec le recul "tout se passait
dans la mâchoire". C'est que je ne sais pas écrire, c'est que
je n'ai rien à raconter. C'est qu'il me faut une scène, qui gronde
en moi. treize ans, le pouls acéré. Le sommeil paisible. Le coeur
obèse. L'haleine tiède. Nuque. Course. Pieds. Route. Bruit. Tu ne
t'effondreras jamais. Tu partiras loin, dans ta vie, et je penserai à
toi, je te mettrai dans mon ventre, je te ferai circuler de mon cœur
à mes muscles. Et je défile, devant toi, sur la place de l'enfance.
Carnaval, je suis plein d'étages. L'enfant armé qui ne sait pas se
servir des fusils. L'innocence effrayée par elle-même. Tu aimes,
confidence. Mes bras aux blessures, et quand je saute dans l'eau qui
n'existe pas j'éclabousse quand même. Je ne laisse rien sur le
passage. Je ne frappe sur rien. Parfois les vitres, le plexiglas,
parfois mon ventre. Je fonds en moi. Je vais: je vais te, maintenant
que j'ai vingt ans, maintenant que je sais l'impact de la peau,
maintenant que mon parfum colle aux arbres, maintenant que ma
violence est dans le secret. Maintenant, que j'ai les yeux profonds
et inutiles,un corps grand comme le monument, la tristesse dans la
crèche, l'enfance en miettes dans les creux. Tu as les cheveux si
longs qu'on dirait mes cris. Je tire. Dans ma chambre J'entends
encore maman dire non. Aujourd'hui les gens prennent comme maman la
même voix apeurée et timide. Ceux qui me lisent, me regardent avec
des yeux méfiants. Bonjour, tout ça se passe dans mon corps. Voyez
ma vie, la blessure reproduite, la parodie des joies. Mais je suis
heureux, je jure, sur la tranche d'un sacrifié, que je suis heureux.
Je fais le rapport. Confidence. Tout me revient. On va te
reconnaître, ma confidence. Tu étais inquiète. Tout me revient.
J'aime ton rire. Maman dit non, et nous sommes juste à côté. Tout
me revient, quand je tiens le manuscrit dans mes bras. Et c'est trop
brusque. Je dois placer mes idées. Je cherche le corps de l'écriture
dans toutes les rues. Aucun ne correspond à ce vertige. Je dis ton
prénom. Tout me revient. Mes treize ans. La proviseure qui croise
les jambes et ma tête qui tourne. Hier soir, j'étais dans les
draps, et je me laissais faire par le sommeil. Et là, il faut que je
fixe mes idées. Brouillon. J'ai l'écriture brouillon. Comme un raz
de marée. Rien ne se fixe. Je dois fixer mes idées. Tout me
revient. Ton heure et ces murs qui tombaient lentement, lentement.
Pardon si tu lis ça. Je sais que tu lis. Tu vas te reconnaître.
J'avais déchiré mes collants en laine de treize ans, et ouvert la
porte. Je suis arrivé, j'ai ouvert la porte et je suis entré, ton
parfum est venu dans cette chambre. Je le connais. Il a déposé ton
odeur. Tu me fais peur quand tu as un regard de poupée de plainte..
Hier soir, j'étais dans ces bras, à deux heures quarante sept
minutes, je crois. Monsieur, sortez, je ne veux plus écrire,
laissez-moi tranquille. J'arrive avec un corps comme une adresse.
Aujourd'hui, je suis presque propriétaire. J'entends une voix à
l'intérieur me dire "je n'ai pas mes propres pensées, parce
que je n'ai pas mon propre corps". C'est à ce moment là, que
je loge en moi. Que je m'installe dans cette peau. A treize ans.
J'entends encore les autres dire « il est dérangé, il me fait
peur, avec ses yeux, ses yeux, ses yeux ». Dérangé. Non, occupé.
Oui. Pas dérangé. Rien ne me dérange. Tout m'occupe. Je suis
occupé. On m'occupe. C'est si simple d'être celui dont tout le
monde parle. Je refuse. Je suis arrivé brûlant comme un soleil
timide. treize ans. Je disparaissais à trois heures vingt-cinq sous
le sommeil en avance de Lara. Tu apparaissais en ombre. Je veux. Je
suis si gros. Tu es si mince. Tu es l'eau du bain trop froide. Je
suis entré. J'ai jeté des poupées sur mon lit. Et je suis monté
dans mes souvenirs. Je suis monté. Monsieur, je veux allez jusqu'au
bout de l'écriture, ce qu'on imagine pas encore. J'entends encore
Maman expliquer « non ». Je te grifferai si tu venais un jour,
contre les couvertures de ma bibliothèque. Ce n'est pas dans la
violence. Non, c'est autre chose. Une panique. Et je te dirai, là je
te dirai, la confidence. Là, oui, je te dirait, sur toi, sur
l'étouffée : « je veux t'arracher la peau ». Je te dirai, et je
ne voudrais plus que tu sortes des draps, je m'allongerais sur ton
ombre lucide. Pardonne-moi. C'était avec toute la violence de
l'enfance trop mouillée. C'est si facile, d'être comme tout le
monde veut. Monsieur, laissez-moi allez au bout de l'écriture.
L'enfance glissante. Sans matière. L'enfant pendant sous les mains.
Je veux t'arracher la peau. Tout me revient. Et c'est ça ma
confidence. Tout me revient quand je tiens le manuscrit dans les
mains. Il me faut une scène. Ne pas publier, ne pas dire, je publie
depuis que je meurs. Je dis ça. Toi et moi l'écriture secrète. Il
y a des débuts partout, sur mon corps. Pardon d'ouvrir la scène. Ca
aussi c'est ma confidence : la naissance de l'écriture. Ne pars
jamais, depuis j'ai 20 ans. Je serai là, encore, dans la répétition,
des choses qu'on lit déjà. Des terres qui nourrissent comme ce que
je tiens dans les mains. La louve sans pattes.
J'entends aujourd'hui ma mère qui me lit et qui dit « non ». Mais ça elle ne sait pas, tout ce qui me revient. Tout ce que tu m'habites.